Un champ de vue limité pour MSA durant le voyage
Tout au long de cette phase de croisière de plus de 7 ans, le satellite Mio est enfoui derrière un bouclier thermique qui le protège du rayonnement solaire, ce qui limite considérablement le champ de vue des instruments. En particulier, dans le vent solaire, les populations d’ions sont très focalisées et ne peuvent pas être observées avec un tel champ de vue.
A l’inverse, lors des survols planétaires d’assistance gravitationnelle (à la Terre le 10/04/2020, à Vénus le 15/10/2020 et le 10/08/2021, à Mercure le 2/10/2021, le 23/06/2022, et le 20/06/2023), Bepi Colombo est immergé dans des populations d’ions plus isotropes, et ces populations peuvent alors être observées malgré le champ de vue limité de Mio.
A bord de ce satellite, MSA est l’instrument du consortium « particules » MPPE (Mercury Plasma Particle Experiment) dédié aux mesures de composition. Après insertion en orbite autour de Mercure, cet instrument mesurera les fonctions de distribution tridimensionnelles des ions (jusqu’à 15 espèces) sur une large gamme d’énergie (de 1 eV/q jusqu’à 40 keV/q) avec une haute résolution en masse (m/∆m > 50) obtenue à l’aide d’un concept instrumental original (principe « réflectron »). Ces performances permettront (1) d'analyser la composition du plasma dans l’exosphère et la magnétosphère de Mercure, (2) d'examiner les processus d'injection du vent solaire et des populations d'origine planétaire dans la magnétosphère, et (3) d'étudier les processus d’accélération à l'œuvre en cours de transport. Les mesures d'ions « pick-up » lorsque Mio se trouvera dans le vent solaire permettront également une analyse de la composition du gaz interstellaire.
Un fonctionnement nominal pour MSA
Après plusieurs mises à niveau depuis le lancement de Bepi Colombo, le spectromètre MSA a fonctionné de manière quasi-nominale (bien que dans un mode de télémesure dégradé) lors du troisième survol de Mercure en juin 2023, préfigurant des résultats particulièrement intéressants pendant la phase nominale de la mission (2026-2028).
La Figure 1 ci-dessous montre ainsi le spectrogramme énergie-temps (taux de comptage des ions codé en couleurs en fonction du temps et de l’énergie des ions) obtenu lors de ce survol. Après traversée de la magnétopause, cette figure révèle l’existence d’une couche-frontière à basse latitude sur le flanc soir de la magnétosphère avec une signature caractéristique de dispersion énergie-temps qui n’est pas sans rappeler celle observée dans le manteau magnétosphérique. La Figure 1 révèle également des populations d’ions injectés depuis la queue et accélérés au-delà 10 keV dans le voisinage proche de la planète. Autant de résultats nouveaux par rapport à ceux obtenus par MESSENGER. Dans la Figure 1, enfin, la sortie de la magnétosphère du côté matin est caractérisée par des populations d’ions de plus basse énergie, comme attendu dans la magnétogaine.
Figure 1 : Observations MSA des ions en fonction du temps et de l’énergie. La ligne verticale rouge représente le point le plus proche de BepiColombo à Mercure (~ 235 km de la surface de Mercure).
D’autre part, la Figure 2 ci-dessous montre les résultats obtenus pour la composition du milieu. Elle révèle la présence d’ions lourds (groupe Na et groupe Ca) dans la magnétosphère interne, populations clairement issues de l’exosphère de la planète et recyclées dans la magnétosphère jusqu’au voisinage proche de la planète. Ces résultats originaux font l’objet d’une analyse approfondie et apportent des éléments contextuels utiles pour l’interprétation des mesures d’autres instruments (e.g., analyseur d’ions MIA à bord de Mio ou spectromètre UV PHEBUS à bord de MPO).
Figure 2: La composition ionique mesurée par MSA tout au long de la traversée de la magnétosphère de Mercure.
Contacts
- Dominique Delcourt, LPP, dominique.delcourt(at)lpp.polytechnique.fr>
- Lina Hadid, LPP, lina.hadid(at)lpp.polytechnique.fr
